Le Sénégal boucle la trêve de mars à la deuxième place du groupe B des éliminatoires de la Coupe du Monde 2026, derrière la RD Congo. Les deux matchs contre le Soudan (0-0) et le Togo (2-0), comptant pour les 5e et 6e journées, devaient permettre aux Lions de consolider leur position, voire de reprendre la tête.
Objectif atteint, mais il y a évidemment beaucoup à dire au sortir de ce rassemblement qui a suscité tant d’espoir et de renouveau au sein de la Tanière. Si la victoire face au Togo a redonné de l’air, le nul insipide contre le Soudan, l’invité surprise de ce groupe, a fait mal et a soulevé des interrogations sur les perspectives de la Tanière de Pape Thiaw.
Le nouveau sélectionneur national a pourtant misé sur un groupe équilibré, mêlant cadres expérimentés et jeunes espoirs. Six nouveaux appelés dans un groupe de 26 joueurs, dont seuls Ilay Camara, Assane Diao et Antoine Mendy ont été testés en jeu. Le gardien de but Yehvann Diouf, le milieu de terrain Cheikh Niasse (blessé et rentré en club entre les deux matchs) et Richard Sagna (le seul local du groupe) sont rentrés sans la moindre minute.
Moussa Ndiaye plébiscité mais laissé sur le banc
Mais parmi ceux qui n’ont pas eu de temps de jeu, le cas de Moussa Ndiaye a le plus fait jaser. Pour d’aucuns, les forfaits d’Ismaïl Jakobs et El Hadji Malick Diouf devaient permettre aux Sénégalais de voir ce que le garçon vaut sur cette aile. Le joueur d’Anderlecht, seul latéral gauche de prédilection du groupe, mais préféré sur le banc pour l’ensemble des deux matchs, a été plébiscité par bon nombre de Sénégalais, mais il faudra attendre prochainement.
Ces absences de l’équipe-type n’ont pas aidé à résoudre les problèmes structurels, notamment au poste de latéral gauche, où Krépin Diatta, milieu offensif devenu latéral, a été préféré à Moussa Ndiaye contre le Soudan. Un choix tactique risqué, source d’instabilité défensive et de déséquilibres dans les montées, qui a alimenté les critiques envers le staff.
D’ailleurs, à plusieurs reprises, et ça lors des deux rencontres, Krépin positionné sur le côté gauche revenait systématiquement sur son pied droit au moment où les attaquants plongeaient dans la surface adverse. Avoir un gaucher comme Moussa Ndiaye aurait peut-être donné plus d’automatisme aux Lions dans leurs phases offensives.
Iliman Ndiaye, l’étincelle qui a manqué aux Lions
Le match contre le Soudan, en particulier, a révélé les lacunes du moment. Malgré une possession dominante, les Lions ont buté sur un manque cruel d’efficacité, avec 20 tirs tentés, 5 seulement cadrés et zéro but. Une performance symptomatique d’une attaque orpheline de Iliman Ndiaye, absent pour cause de blessure. Le joueur d’Everton, habituel déclencheur de l’animation offensive de Pape Thiaw, a cruellement manqué pour briser le bloc adverse.
Sans leur numéro 13, les Lions ont ronronné sur la pelouse sans vraiment savoir sur qui s’appuyer pour perforer la défense adverse. Le jeu était terne et déchiré à Benghazi face au Soudan, un peu mieux face au Togo à domicile avec Pape Matar Sarr, Habib Diallo et Assane Diao. Le néo-international a pris des initiatives pour porter le jeu à son compte, mais encore en adaptation au jeu africain, il n’a pas eu de réussite dans ses actions.
En son absence, seule la jeunesse d’Assane Diao a apporté quelques éclairs lors du match contre le Togo à Diamniadio. L’arrivée du joueur de Côme dans l’effectif et sa prestation lors de sa première titularisation, laissent entrevoir de belles choses dans l’animation offensive de l’équipe une fois qu’ils se retrouvera avec Iliman Ndiaye et Habib Diarra dans le onze. La créativité d’Iliman et l’explosivité de Assane Diao seront sans doute des armes fatales pour Pape Thiaw à l’avenir.
Habib Diarra…
Au milieu de terrain, l’absence de Habib Diarra s’est également fait ressentir. Le volume de jeu du capitaine strasbourgeois, sa capacité à accélérer les transitions et à s’infiltrer dans le dernier tiers auraient pu désorganiser des défenses compactes. Sans lui, le duo Pape Matar Sarr – Lamine Camara a manqué de densité dans le dernier tiers, laissant l’attaque souvent isolée, sevrée de réelles chances pour faire trembler les filets.
Les remplacements n’ont pas fait l’unanimité
La gestion des remplacements n’a pas effacé ces carences. Face au Soudan, les changements tardifs (comme l’entrée de Assane Diao à la 79e minute) n’ont pas inversé la tendance, tandis que contre le Togo, certaines substitutions telles que la sortie d’Ilay Camara – qui a montré de belles choses sur l’aile gauche en lieu et place de Krépin, ont fait planer l’ombre d’Aliou Cissé sur la Tanière. Ces choix interrogent sur la cohérence tactique de Pape Thiaw, surtout face à des adversaires basés en bloc bas.
Sadio Mané ! L’autre cas qui a fait parler durant ce rassemblement de mars. La star des Lions a traversé cette trêve en étant transparent. De quoi susciter le mécontentement de certains observateurs qui considèrent que le numéro 10 et leader des Lions devrait parfois céder sa place. C’est vrai ! On n’a plus le Sadio Mané des 5 dernières années qui faisait peur et terrorisait les défenses adverses. Avoir des joueurs dans le groupe pour assurer sa relève, ferait du bien au Sénégal. Faudrait-il penser à le faire sortir de temps à autre s’il n’est pas en forme ? C’est la question que beaucoup se posent.
Courage et cohérence pour un chantier énorme
Si le nul contre le Soudan et la victoire face au Togo permettent aux Lions de garder le cap vers la qualification, ces résultats ne masquent pas totalement le chantier énorme qui attend Pape Thiaw. Le sélectionneur se trouve dans une position où il doit qualifier le Sénégal, mais sans manquer de préparer un groupe performant pour la Coupe d’Afrique des Nations au Maroc en fin d’année – où le Sénégal ne sera pas un outsider, mais bien un prétendant au titre.
Pour le premier objectif qui lui aurait été assigné, c’est-à-dire qualifier le Sénégal au Mondial, Pape Thiaw reste en jeu. La RD Congo est leader du groupe avec 13 points devant le Sénégal (12 points). Désormais, chaque faux pas lors des 4 prochaines journées, pourrait compliquer l’objectif de qualification au mondial 2026 pour les Lions.
Au final, cette trêve de mars souligne un paradoxe : un effectif riche en individus talentueux, mais un collectif encore perfectible dans l’animation offensive et les choix stratégiques. Pour Pape Thiaw, l’urgence sera de trouver une alternative à Iliman Ndiaye, de retrouver sa cohérence tactique et d’affiner la gestion du temps de jeu de son groupe pour garder tout le monde en confiance et impliqué. Les prochains matchs de ces éliminatoires, dès septembre prochain, ne laisseront pas droit à l’erreur dans cette course serrée vers le Mondial 2026.
Mais avant cette date, les amicaux contre l’Irlande et l’Angleterre révélerons le niveau actuel du groupe des Lions, à un an du mondial et à quelques mois de la Coupe d’Afrique Maroc 2025.
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