Il fait partie des athlètes en lice pour les Jeux Olympiques dont le Sénégal nourrit beaucoup d’espoirs pour une médaille olympique. Mbagnick Ndiaye, 30 ans, est un roi en Afrique qui rêve de monter sur le podium à Paris. Dans un entretien accordé à Wiwsport, il partage avec nos lecteurs son histoire avec le Judo, sa préparation et ses ambitions.
Comment se passe la préparation à quelques jours des JO Paris 2024 ?
Je fais juste de l’affûtage, remettre les bases. Je ne mets pas trop d’intensité pour réduire les risques de blessure. On calcule tout pour pouvoir se sentir bien. Je fais en moyenne deux séances par jour, sauf le mercredi et le week-end où je me repose et récupère.
Pouvez-vous nous parler de votre première expérience lors des JO Tokyo 2020 ?
C’était incroyable. Quand on m’a dit que j’étais porte-drapeau, c’était un poids sur la tête. C’était un honneur, une fierté. Ce n’est pas donné à tout le monde. J’ai profité du moment.
Quels sont les enseignements tirés ?
J’ai beaucoup appris des exigences de cette compétition. Les JO, c’est un niveau qui est très élevé. Je m’étais préparé à l’image des Championnats du monde que j’avais fait et ce n’était pas la même chose. J’ai gagné en expérience. Là, je sais ce qui m’attend. Il y aura tous les meilleurs judokas du monde. Du coup, il faudra sortir du lot pour monter sur le podium. Faudra vraiment être prêt le jour-j.
Monter sur le podium est donc ton objectif en 2024 ?
Sur le podium, rien d’autre. Je pense que je peux le faire, j’ai les capacités. Ce sont des judokas que j’ai l’habitude de croiser. Y en a, je les ai battus, d’autres que je n’ai jamais croisés en compétition. Peu importe qui sera en face, l’objectif, c’est d’aller jusqu’au bout.
Combien de médailles a remporté Mbagnick Ndiaye dans sa carrière ?
En tête, en Championnat d’Afrique, je compte 4 médailles d’or, 2 en argent et 3 en bronze. En Open, j’ai 14 médailles en Or, 3 en argent et 5 en bronze. Sur les autres compétitions comme les grands prix, slams et autres : une médaille de bronze et je suis classé 7e sur les championnats du monde. Il ne me reste que la médaille olympique. J’espère que cela se fera à Paris.
À quoi ressemblerait ta vie après une médaille olympique ?
Je vais me reposer. Je suis fatigué. Cela fait un plusieurs années que je ne me suis pas reposé. A chaque olympiade, il faut repartir pour gagner des points. J’ai fait ce sacrifice de ne pas prendre de vacances. Donc après Paris, avec la médaille, je vais me reposer, soigner les bobos que je traine et repartir sur de nouvelles bases avec le judo. Profiter de ma famille, de mes proches et savourer avec les Sénégalais.
Quelle est l’histoire entre Mbagnick et le judo ?
J’ai commencé le judo à l’âge de 5 ans. J’habitais à 50m du dojo national qui a été détruit malheureusement. De chez moi, j’entendais le bruit des judokas. Cela me plaisait et je partais les regarder. J’ai fatigué mes parents pour m’inscrire et ils ne voulaient pas parce que c’est un sport un peu brutal. Avec mon petit frère (Saliou Ndiaye), on a commencé le même jour. On continue toujours, lui, il est à l’ASFA et fait sa petite carrière. Récemment, il a décroché le bronze aux Championnats d’Afrique. On se soutient et j’espère qu’il sera à Los Angeles (JO 2028).
Les primes des athlètes font parler actuellement … Quelle anecdote pouvez-vous nous partager ?
Je n’ai jamais rien reçu avec tous mes titres. Je n’ai jamais vu le président de la République, pas de mail ni de message, rien du tout. C’est vraiment désolant. Je me rappelle lors des Jeux Africains Rabat 2019, nous étions plus de 100 athlètes, toutes disciplines confondues, et la seule médaille d’or c’était moi. Je me suis dit peut-être avec cette médaille ma vie va changer. Au final, cela m’a beaucoup… Parce que dehors, les gens pensent que tu as gagné beaucoup d’argent alors tu es toujours au même niveau. Et pour l’anecdote, quand je suis rentré à Paris, c’était vraiment fou. Parce qu’arrivé à l’aéroport, je voulais prendre un Uber pour rentrer, ma commande ne passait pas. Parce que dans mon compte bancaire, je n’avais rien. J’ai pris les transports en commun pour rentrer. Je suis resté une semaine sans sortir de chez moi parce que j’avais vraiment honte à chaque fois qu’on me demandait : « c’est comment la prime ? ».
Quel appel lancez-vous aux autorités ?
J’espère que le nouveau gouvernement va prendre conscience de cela. Récompenser aux mieux les athlètes à leur juste valeur. Si je prends l’exemple des footballeurs qui ont été récompensés parce qu’ils étaient champions d’Afrique, je l’ai été en même temps. Ils ont été accueillis et ils le méritent, je ne dis pas le contraire. Mais donner 20 millions à Sadio Mané, je ne sais pas ce qu’il changera de sa vie. Le donner à un autre athlète peut faire une différence parce qu’il fait un sport amateur. Et être champion d’Afrique, on ne peut le faire que pour son pays. Je trouve cela désolant que l’on puisse les récompenser dès leur sortie de l’avion alors que nous, à notre niveau, nous devons parler dans les médias, batailler…
wiwsport.com (NAF)