La Commission de Discipline de la RFEF a sanctionné de deux matchs de suspension à Cheikh Kane Sarr, qui a pourtant été victime de racisme aux yeux du monde entier. Une décision dénuée de cohérence et regrettable.
On se répète : le ridicule ne tue pas. Ou alors insidieusement et à petit feu. La décision de la Commission de Discipline de la Fédération Royale Espagnole de Football de suspendre Cheikh Kane Sarr deux matchs et d’infliger à son club du CF Rayo Majadahonda une défaite sur tapis vert, un retrait de trois points et une lourde amende mais d’enterrer presque les actes racistes subis par le Sénégalais atteste du marasme dans lequel nage la RFEF, ou plus précisément l’instance dirigeante du football espagnol. Quand les scandales sont innombrables, il est toujours plus simple de prendre des décisions dénuées de consistance.
« Défendre ma dignité vaut plus que tout »
Revenons aux origines d’une affaire qui suscite un énorme tollé médiatique dans les quatre coins de l’Espagne, mais seulement dans le pays ibérique bien évidemment. Ce samedi 30 mars 2024, lors du match de la 30e journée du Groupe 1 de la Primera RFEF (D3 espagnole) opposant le Sestao River Club au CF Rayo Majadahonda, Cheikh Kane Sarr est allé s’expliquer directement avec des soi-disant supporters de l’équipe adverse. Motif ? Le Sénégalais de 23 ans a commencé à recevoir en seconde période des insultes racistes provenant de la tribune derrière ses cages. « Ils étaient en train de tout dire : ‘putain de noir, fuis, noir de merde’ », précisait la victime.
Donc comment une instance d’une telle importance a-t-elle adopté une attitude si pathétique pour juger un tel acte et sanctionner joueur et club pourtant clairement victimes ? La faute à l’arbitre de la rencontre. Francisco García Riesgo, qui ne pouvait pas entendre des insultes – vu qu’il s’était placé au milieu du terrain durant les faits -, a évoqué dans son rapport une attaque violente de Cheikh Kane Sarr sur les supporters et sur lui (l’arbitre), après notamment que toute l’équipe du Rayo Majadahonda ait quitté la pelouse. Évidemment, très peu de personnes comprennent. Surtout dans un pays où les footballeurs ne cessent de vivre pareille situation.
« La sanction contre le club me fait mal, a confié Sarr dans un entretien avec MARCA ce mercredi. Le coupable doit être puni davantage pour que cela ne se reproduise pas la prochaine fois. Si la personne est identifiée et que la sanction est financièrement importante, elle réfléchira beaucoup avant de le refaire. Si nous faisons preuve de force, le racisme peut prendre fin. Des sanctions très lourdes doivent être imposées aux racistes partout dans le monde. Défendre ma dignité vaut plus que tout. Je ne me bats pas pour moi, nous nous battons pour tout le monde. Cela ne devrait pas exister dans la vie. Nous sommes tous pareils. Mon sang est aussi rouge, comme le tien et comme celui de tout le monde ».
🤜💬 El mensaje de Cheikh Sarr, en exclusiva para Marca: "Estoy pidiendo a la gente que piense más, que tiene familia, que tiene hijos… que hay que mostrar una buena imagen a la sociedad" pic.twitter.com/hvB7BSq0fa
— MARCA (@marca) April 3, 2024
Gare à vous footballeurs noirs en Espagne
Même moins lourde que prévue – le joueur pouvait écoper jusqu’à huit matchs de suspension -, la sanction contre Cheikh Kane Sarr ne devait en aucun cas exister. Le carton rouge devait purement et simplement être annulé. Tremblez footballeurs noirs en Espagne, les week-ends prochains « putain de noir, fuis, noir de merde » criés sur vous par un «supporter» et vous devriez rester sans réaction au risque d’être expulsé puis suspendu. Non, à vrai dire écoper d’un match de suspension pour avoir été victime de racisme est une absurdité totale. « Je pense qu’il faut d’abord protéger le joueur qui est sur le terrain et lui demander ce qui s’est passé », estime un Sarr qui ne comprendra probablement jamais cette expulsion.
Quant aux «supporters» du Sestao River Club, c’est dossier classé sans suite. En tout cas pour le moment, aucune enquête n’a été ouverte pour identifier les auteurs. Et le concernant, le Sestao River Club a évoqué de seulement deux matchs à huis et d’une amende de 6.001 euros. Ridicule. Mais heureusement, Cheikh Kane Sarr, soutenu par Vinicius Junior notamment, n’est pas tout seul. « Les gens (au Sénégal) m’appellent, mais c’est moi qui les calme. Ils savent que la vie est comme ça et que ce sont des choses qui nous font apprendre. Je ne suis pas le premier joueur à qui cela arrive, je suis un humain et je dois me battre pour que ça cesse », conclut-il avec MARCA. Force à toi Cheikh !
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Par Mbagnick Dione